Rupture : l’Introverti et La Déception Amoureuse

L’échec sentimental est-il plus insupportable pour l’introverti ?

On ne peut en aucun cas se permettre de hiérarchiser l’échelle des souffrances affectives, car personne n’est jamais épargné en la matière. Que l’introverti soit issu d’un entourage familial équilibré ou qu’il n’ait pas tiré le ticket gagnant à cette injuste loterie, on peut essayer d’apprendre de cette épreuve majeure, et d’en transformer l’essai en jack pot sentimental. Synopsis.

 L’amour a peu de chances d’émouvoir un petit cœur sec et personnel. 

 Maxime Du Camp 

Les introvertis amoureux

Si on envisage l’introversion pour ce qu’elle est réellement, une préférence purement cognitive, on ne peut pas arrêter cette divergence à cette seule constatation : les discrets vivent absolument tout autrement, à commencer par la relation amoureuse et ses dégâts considérables. On déplore des séparations quotidiennes de par le monde et la vie conjugale n’a jamais été aussi bancale qu’aujourd’hui. Bientôt le couple sera l’exception quand il n’y a pas si longtemps, les adultes divorcés ou célibataires faisaient l’objet de toute sorte de murmures désobligeants quand ça n’était pas tout simplement l’exclusion du cercle amical. Plus de couples d’amis, eh bien, plus d’amis.

 La confiance produit la fidélité dans les magnanimes, et excite la trahison dans les lâches. 

 Chevalier de Méré 

Des ruptures en nombres

Les introvertis sont peut-être plus stables, mais ils mettent plus du temps à trouver un partenaire compatible, c’est certainement les essais avortés qui ont un impact redoutable, en premier sur l’image de soi altérée par les allées et venues de ces autres-là, qui se sont greffés et dont les ombres cohabitent autour de soi. Vivre avec des fantômes qui ont joué un rôle, quel qu’il soit, sont autant d’obstacles à se comprendre, comme des murs que l’on pose entre soi et soi. Toutes les ruptures ne se valent pas : certaines ne servent à rien, à part recouvrer son libre arbitre, et d’autres dévastent et laissent un champ de bataille infertile, ce sont ces espaces vides que l’introverti arpente inlassablement, pour trouver des réponses qui n’arriveront jamais.

 Le mal des incompréhensions ronge nos vies, détermine des comportements aberrants, des ruptures, des insultes, des chagrins. 

 Edgar Morin 

L’introverti s’engage davantage intérieurement : l’inexpérience

On n’évoque pas à la légère le degré d’intimité d’une relation pour un introverti monogame : le discret n’entre pas religion, mais ça n’est pas loin d’y ressembler. Les introvertis possèdent peu de ressources externes, et quand ils décident de se passionner pour l’autre, ce dernier entre en lui. La vie intérieure s’enrichit de nouvelles saveurs et espoirs, et toutes ces perspectives forment une nouvelle grammaire, un horizon nouveau. Cet univers interne n’est plus uniquement peuplé que de versions soi, mais d’une lune supplémentaire, insufflant son magnétisme et influençant profondément tout ce bel équilibre. Comme une planète, submergée de marées et de pluies incessantes, provoquent un déluge emportant tout dans son sillage. Tellement affecté dedans pour ne pas s’y égarer, le discret se sait ravagé de l’intérieur : l’introverti ne perd pas ses plumes dans une rupture, mais un cosmos tout entier.

 Toute limite que je recule est un esclavage que je brise. 

 Henri-Frédéric Amiel 

Rebondir est plus confus pour l’introverti : l’isolement

Des ressources ravagées de l’intérieur, et peu de tissu relationnel : si parler de ses problèmes soulage, et si cela est véridique, on comprend aisément pourquoi les introvertis vivent dans des impasses intimes. Peu d’ami et pas de réflexe de survie, comme se sortir la tête du sable, en finir avec le complexe de l’autruche autarcique. On lit tant de conseils, certainement judicieux sur la gestion de crise affective, si peu adaptés aux introspectifs. La solitude n’est pas celle des autres, bien que la souffrance soit universelle, évidemment. C’est un hiver trop long, des matins toujours gris, des nuits n’en finissant pas, et des journées à se demander pourquoi et personne à qui parler. Et la contrepartie qui n’arrive pas, l’explication n’ayant pas lieu d’être, l’introverti s’épuise mentalement, désespérément seul avec ses questions et erreurs, plein de regrets. Recoller les morceaux d’un cœur brisé, ici.

 Il faut briser certains souvenirs quand ils ne font que vous désenchanter de la vie et vous dégoûter des jours présents ! 

Henri Perreyve 

Les introvertis n’ont pas le choix : Ils ruminent

C’est un fonctionnement propre à l’introverti, la construction mentale des discrets ne permet pas le répit psychique en cas de conflit interne, et une rupture demeure un combat hormonal puissantLa neurobiologie des espoirs mal placés ici : il ne faut pas omettre la chimie amoureuse et la sensation de vide que l’on ressent lors de son inaccomplissement, on ampute l’hormone de l’attachement et on répand des neurohormones du stress ne favorisant absolument pas la paix intérieure. Comme une dépendance, mais en moins formulable, puisque l’introverti tente de ne pas laisser son hamster mental prendre le dessus, infructueusement. Un introverti, qu’il soit ou non à l’origine d’une rupture fait le film à l’envers, à l’endroit et cherche à faire sens là il n’y a plus rien.

Le long soupir brisé est le timide frère du sanglot. 

 Rémy de Gourmont 

L’introverti vit la trahison de plein fouet : la perte de sens post-rupture

On sait que les introvertis manifestent une activité sanguine cérébrale plus intense, que leur cortex préfrontal est particulièrement actif, mais c’est aussi toutes les autres zones du cerveau qui sont noyées de neurones inhabituels, et ça l’introverti le sent, car il passe son temps chez lui, là-haut, et qu’il n’y est plus le bienvenu. On rumine, de la peur, des craintes et l’amygdale n’en finit pas d’envoyer des signaux anxieux d’inquiétude. Si la plupart des humains sont désorientés lors d’une rupture, qu’en est-il de l’introspectif qui ne peut même plus compter sur ses méninges : plus rien ne permet de continuer à fonctionner, la perte de la signification bat son plein, on ne sait plus grand-chose, si ce n’est que le discret tourne en rond, et qu’elle ou il rêve d’une nuit dans les bras du divin Morphée, aux abonnés absents depuis quelques soirs.

 Imposer, sans proposer une concertation, cela est voué à l’échec. 

 La sagesse populaire 

Imposture et introversion font mauvais ménage : le dol (ou consentement vicié)

La tromperie et son assimilation que l’introverti finit par comprendre. Les discrets n’investissent pas tous leurs fonctions cognitives de la même façons : certains vivent une rupture et évoquent un cœur brisé, et d’autres perdent leurs facultés intellectuelles momentanément, et ces deux fonctionnements compensent la trahison, avec les moyens du bord, mais la raison dans les deux cas a quitté le navire attendant des eaux plus favorables pour cause de mal de mer. J’ai pour habitude d’écrire qu’il revient à soi de se pardonner ses erreurs. Avoir tenu une main artificielle, comme on sait que l’on commet une faute que l’on inflige à soi-même, ne lui est pas imputable : on lui a tendu un bâton et l’on ne peut pas s’étonner de s’être fait battre, car souvent le discret savait (🚩🚩… 🚩). Un discret se remet mal d’une traîtrise, car il contemple loin dedans, que rien n’allait aller ailleurs que là où l’on s’est trouvé.

 La rupture avec soi est le plus court chemin pour aller à soi. 

 Christian Bobin 

Les introvertis négligent les ressources extérieures

Une aventure d’un soir fait souvent office de pansement chez les moins introspectifs, et on peut leur envier la capacité à dépasser les coups durs, même s’il semble que la surface cache parfois bien des bayous boueux. L’amitié fait défaut, et comme toujours, l’introverti se laisse moins aller à la confidence : à moins de faire le choix raisonnable de chercher de l’aide en consultant, un des meilleurs moyens de ne pas succomber à une blessure affective négligée, devenant abusivement profonde. La bonne nouvelle est que l’introverti ne se laisse pas aller à renouer avec l’objet de leur adversité : les discrets sont en général conscients qu’il faut en terminer, sans se laissent aller à des retours de flamme post-ruptures insensées : les introvertis ne rappellent pas.

TheIntrovertSinger

G. Stenberg, J. Risberg, S. Warkentin, I. Rosén, Regional patterns of cortical blood flow distinguish extraverts from introverts, Personality and Individual Differences, Volume 11, Issue 7, 1990,Pages 663-673,ISSN 0191-8869, https://doi.org/10.1016/0191-8869(90)90251-L.

Les citations sont toutes extraites du site Mon Poeme.fr

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