Que faire quand la réalité est inacceptable ?

Quand accepter est impossible, quelles sont nos options ?

Résister. Si banal, que le thème de l’acceptation, est devenu la baguette de pain du boulanger new age. Assis sur un trône fleuri, meuglant des contre-vérités, devant un par terre naïf manipulé. Cherchant une boussole magique. Luciole ou phare ? Les biais cognitifs qu’emploient les manipulateurs, sont bien connus des sceptiques.

Covid-19 est une épreuve, dont chacun tire une leçon. À commencer par notre réaction à l’annonce du confinement. Du déni à l’anxiété. La pandémie a placé, un grand nombre d’entre nous, dans la précarité affective et financière. Celles et ceux ne sachant plus comment payer leurs factures. Ou pire, leurs paniers au supermarché. La honte projetée sur celles et ceux qui se ruaient sur les paquets pâtes, avaient-ils vraiment tort ? De nombreux couples envisagent une séparation, au moment où ces mots sont écrits. Les femmes brutalisées, sont plus en sécurité dans la rue, que chez elles. Des enfants souffrent de parentalité immature. Des hommes et des femmes célibataires, jeunes et mâtures, se sentent seuls. La vie sociale ayant perdu sa fonction de masque surréalité. On nie la réalité parce qu’au moment où elle nous tombe dessus, on ne peut, ni la comprendre ni en traiter les conséquences. On gagne du temps.

Des conséquences de mauvais choix passés.

Le ralentissement que beaucoup subissent, sans avoir encore saisi, une occasion de se comprendre. De regarder en face ses erreurs, ses choix. Peu de couples ne vivent pas sans regrets. Peut-on continuer à se mentir ? Ce métier est-il vraiment fait pour moi ? Ma vie est-elle le résultat de désirs ne m’appartenant pas tout à fait ? Pourquoi ce manque d’argent ? Ces questions portent sur l’identité. Une épreuve joue le rôle de lunettes de vue. C’est y voir plus clair ; quand on décide de les porter adaptées à la vision de la vérité nue.

On n’a pas besoin d’aimer ses problèmes !

L’acceptation est un des exercices les plus impossibles. On accepte par résignation, parce qu’on y est forcé. On se sent tiraillé et emprisonné, sans libre arbitre. Spolié et dominé, quand une réalité coupe l’herbe sous ses pieds. On n’a pas idée du nombre de pensées arbitrant nos circonstances, sans qu’on prenne le temps de s’y arrêter. Pourquoi n’acceptons-nous pas ce qui est ? Les gourous du net vont beaucoup plus loin. Ils proposent d’aimer ce qui est. On passe dans la dimension de la dissonance cognitive. À haute valeur ajoutée pour l’auteur. On comprend facilement qu’il faut se méfier de ces affirmations mercantiles. Dont l’attrait pour leurs proclamateurs, induit une dépendance au mensonge.

Parlons vrai, biaisons moins.

L’erreur fondamentale d’attribution ou le biais de confirmation, deux moyens bien aisés, que nous employons quotidiennement. Permettant de mettre tout et n’importe quoi dans une petite case. Nos éducateurs nous l’ont bien appris, notre entourage social, et la société aussi. On avale tout et n’importe quoi, à grandes cuillères de préjugés présomptueux. Quand on a un scénario prévu, on prétexte tout ce qui arrive, à la prescience de sa conscience. On n’a pas le réflexe de mettre en perspective l’événement, sous un angle plus ou moins aigu. Ou radicalement antagoniste. C’est comme ça qu’on va interpréter une situation comme une véritable catastrophe. Plutôt que de s’interroger sur les opportunités qu’offrent ces nouvelles réalités.

Maintenir la cohérence.

Qui ou quoi ? Est légitime en m’imposant une contrainte injuste ? L’unique constante de l’existence ? Le changement. Y résister est une perte de temps. Nous avons toutes et tous, besoin de le dépenser. Pour en gagner. Se rouler dans le mensonge du déni. Parce que le fantasme est plus attrayant. Plus proche des illusions auxquelles on s’est attaché. Toutes les déformations de la vérité, permettent des espoirs mal nourris réconfortants. Les contraintes que nous affrontons, font compenser l’injustifiable. C’est une sorte de contrat implicite intérieur. Je ne peux pas voir ce qui est. Je le verrai comme je le souhaite. En manipulant la vérité.

«Je pense donc je résiste » (Vincent Angel et Dick D. Steiner).

La perception de ce qui est. De ce qui devrait être. Une habile manœuvre de notre esprit, pour en avoir le contrôle. Une douce illusion temporaire. La triste matérialité de sa vie. Comme quand on va traverser la rue sans vérifier si un véhicule arrive, et qu’on est rattrapé brutalement par le col. C’est ça la réalité, un étranglement soudain. Un sursaut désagréable, presque douloureux. C’est mon pire cauchemar qui vient à se matérialiser. Mes peurs les plus enfouies, montrant enfin leurs vraies couleurs. S’interdire d’affronter ses ombres. Refuser qui est l’autre, qui sont vraiment les autres. Réfuter la dureté des épreuves de sa vie. Une façon de me rejeter moi-même.

Je n’y arriverai jamais.

Je suis nulle ou nul, je manque de courage. On essaye de tordre les circonstances dans tous les sens. Les faire converger vers le moins de souffrances possible. Se noyer dans des confirmations superstitieuses. Chercher du sens où il n’y en a pas. La vie est suffisamment simple pour sembler cruelle. La raison pour laquelle une catastrophe pointe le bout de nez, est le fruit d’un hasard configuré. Refuser de l’accepter en cherchant une notion ésotérique, ou adopter l’évitement. Recule le moment de sauter dans le vide.

Pas d’échec sans jugement.

C’est surtout notre regard sur les circonstances, noircissant lugubrement, tout ce qui ne fait pas partie d’un scénario ronronnant. Scénographique ou photogénique. On n’échoue pas. C’est une interprétation mensongère des apprentissages. D’une route en devenir, d’un édifice en construction. Je suis une cathédrale à solidifier. Manquer une opportunité de grandir, c’est désapprendre de soi. Notre vie est faite pour chercher sans trouver. Dédaigner sa leçon. Ignorer son diamant, taillé au cœur de ses épreuves. On perd ses richesses, à se protéger, de ce qu’on croit blessant.

Sans être d’accord avec le réel.

On n’est pas obligé d’aimer la réalité. Ni d’être d’accord. On n’est pas obligé non plus de faire avec. Se battre pour changer ses tuiles. La réalité n’a pas d’autre fonction cachée. C’est l’éviter qui rend la réalité étrangère, séparée ou honteuse. L’autoflagellation est aussi inutile, prendre ses responsabilités ce n’est pas se faire du mal. S’accuser de tous les maux. Au contraire, comprendre l’erreur dans la compassion. Quand on se trompe ou que la vie décide de nous faire un croche-pied, c’est pour apprendre à se relever. N’est-ce pas comme ça que nous avons tous appris à marcher, à lire et à compter ? L’erreur fondamentale d’attribution permet aussi de trouver une justification moins malaisante, pour nos esprits farceurs.

La métamorphose.

Refuser la réalité est une perte. On peut y perdre le sens de sa vie. Voir l’autre tel qu’il est, la négation la plus courante. La réalité est affreuse quand on la rejette, comme on se rejette soi. Cependant, cette épreuve est rarement autre chose qu’un moyen permettant de se révéler. Chacun d’entre nous peut identifier, des centaines d’opportunités de s’élever. Manquées par orgueil. Piégés par nos émotions. Parce que c’est encore et toujours une résistance de notre faux moi. Ce faux self est si peureux, qu’il préfère la flatterie, à une belle traversée du désert solitaire, métamorphosant.

Combien de grands accidentés, devenus les héros de leurs propres vies, leurs propres légendes ? Des avocats pour des causes nobles et universelles. Combien de misères ont inspiré à tendre la main ! Nous avons tous en nous, un Gandhi qui sommeille, n’attendant qu’un signal pour s’accoucher. Covid-19 est un révélateur cataclysmique. À chacun d’y trouver sa petite perle.

TheIntrovertSinger

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