Fête-t-On Son Anniversaire Chez L’Introverti ?

Célébrer son année achevée et celle qui s’annonce quand on est de tempérament introverti.

Cela arrive chaque année, il faut se plier à des rites sociaux obligatoires, célébrant l’exclusion de ceux qui en sont privés, quel qu’en soit le motif. On peut être de constitution psychologique divergente et ne pas disposer d’espace disque mental pour ces réunions imposées, pourtant on doit admettre que notre porosité au commun nous conforme. Réflexion.

Les introvertis et leurs anniversaires.

Ce que l’on observe aisément en lisant les postes des forums consacrés aux introvertis, c’est qu’ils sont généralement indécis quant à l’utilité de ces rites. Cela écrit, l’affection que l’on reçoit de ses géniteurs ou bien de ses proches relations, demeure une reconnaissance dont l’humain se nourrit, autant que l’oxygène qu’il respire et de ses nécessités vitales, comme de s’alimenter et se protéger par les vêtements et un toit. Les bébés ne survivent pas sans soins et ne se développent pas sans affection. Cela est identique chez l’humain adulte, excepté pour ceux dont le parcours de vie fut trop lourd pour s’y risquer. L’introverti ne se réjouit pas particulièrement de son jour de naissance, néanmoins comme tout un chacun, il se trouve confronté à ces dates symboliquement chargées, dont il faut bien retirer quelque chose. Que l’on soit un introverti misanthrope ou parfaitement intégré dans un entourage affectif chaleureux, voici quelques tentatives de célébrations atypiques, comme eux.

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Bonne année introvertie : je m’accepte.

Ça y est, il est minuit ou bien c’est l’heure précise à laquelle on est né. Je suis née à 3:00 du matin, et cela n’est pas encore arrivé que je sois éveillée à mon jour et heure de naissance, cependant peut-être que cette année je commencerai mon année, ou achèverai l’ancienne par couper mon alarme au milieu de la nuit pour raisonner mon parcours, seule avec les contentements que l’on ressent puisque l’on est soi-même, et que rien ne peut plus me scinder. Comme l’introverti s’est rarement trouvé chez soi en l’autre – attifé de son usuel décret d’étranger – c’est le moment de vivre son mandat terrestre comme jamais, et de s’enfoncer profondément en soi. C’est le moment de veiller sur soi, comme on veille l’enfant intérieur que l’on abandonne continuellement à périr, en faveur des conformismes et collectivismes, et que l’on décide de ne plus jamais laisser attaquable, préservant son intégrité : l’introverti qui s’accepte valide en profondeur sa place, s’offrant le cadeau de prendre celle qui lui revient. Cette année le discret se fait le don de s’élargir et d’imposer sa présence en soi. Le plus beau des présents.

Une journée de bilan : mes échecs.

La fin d’une ère marque aussi l’accueil du soulagement. On ne peut pas passer sa vie à célébrer bêtement des victoires et batailles mal gagnées, parce que l’esprit de l’introverti sait qu’on ne lui vend pas de vent dans des emballages dorés. Un introspectif sait qu’il doit gagner la guerre, celle que l’on mène contre soi, ces allégories interprétées à la lettre des livres de dévotions, ce symbolisme fort rappelant que nous nous battons tous contre nos faiblesses, et nos égos rescapés sans lesquels se battre pour la survie est inconcevable. Et puis cet admirable égo prend petit à petit la place qui me revient, le soi. Le vrai, épuisé de jouer le va-t-en-guerre sans objet, puisque l’introverti sait qu’en cette fin d’année, il s’est encore trahi et qu’il faut faire amende honorable en se le reconnaissant franchement. Célébrer ses échecs, l’introverti le pratique au jour de sa naissance, comme accueillir la mort d’une part de soi, dont on décide de s’abstraire.

Une journée de recevoir : je mérite.

L’introverti a reçu autant qu’il a pu ou cru, comme on décide de son chemin quand on choisit ce que l’on va recevoir : l’introverti qui consent aux autres réceptionne d’eux. L’introverti qui se refuse à cet exercice cherche en soi ce qu’il a cultivé de plus remarquable, dans son regard. L’introverti reçoit d’en dedans, et se réjouit loin intérieurement de ces cadeaux qu’il se fait à chaque fois qu’il y retourne et que ses yeux intérieurs lui restituent tous ces présents. Un introverti est un individu en vase clos, un vase plein et vaste, au sein duquel on est nourri richement, l’assiette est garnie, le buffet fourni, et les douceurs abondantes. Un introverti reçoit tout ce qu’il a compilé durant cette année dans ses labeurs dont il recueille la sagesse. Un discret introspectif, accueille une montagne de cadeaux, dont il sait bien quoi faire, car l’année s’ouvrant à soi s’annonce plus généreuse encore.

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Une journée de dons : je donne.

Une journée de célébration durant laquelle on laisse partir ceux qui ont fait ce qu’ils ont fait. On ouvre la porte grande à celles et ceux n’ayant plus leur place, on leur réserve leur liberté pleine et entière : on quitte et dételle tout ce qui n’a plus d’objet, on n’y garde que les sujets alignés sur ce que l’on a déjà éprouvé de soi. L’introverti fait des offrandes à chaque fois qu’il quitte et laisse partir des situations et acteurs ayant joué leurs rôles, vêtus de déguisements plus ou moins ajustés de vraisemblances. On encourage ces interprètes de se trouver un autre emploi dans une autre pièce de ce théâtre humain, laquelle l’introverti a passé son existence à observer, laissant ces personnages faire leur voyage, baissant les rideaux concluant chaque représentation. Le discret donne, à soi, aux autres, le don de poursuivre chacun son chemin à sa façon, et reprend sa route, solitaire, hâté des rencontres à venir. Un présent que nul autre que soi peut s’offrir.

Une journée d’étape : j’avance encore.

L’introverti sait que le chemin est long, vers soi. On célèbre l’année à venir en l’accueillant sans a priori, avec les attentes que l’on décide envers soi, délesté de celles que d’autres souhaitent, n’ayant pas à voir avec soi. On avance sur un chemin que l’on débroussaille soi-même, loin des sentiers déblayés par eux. L’introverti ne s’abreuve pas aux mêmes sources et ne se nourrit pas au bistrot des vaines successions, mais d’exigences certaines, dont l’escarpement du chemin forge le caractère de bois souple, celui d’un introverti ayant courbé l’échine, sans casser pourtant. Le discret dégage une berge d’un cycle nouvel, comblé de circonstances calibrées pour soi, affranchi des exogènes, cheminant sans lenteur, à son rythme et mesure, asymétrique et ternaire.

Une journée de croissance : je grandis.

L’introverti s’est mis contre le mur de la cuisine et a marqué sa hauteur de son crayon, il grandit encore cette année. Il faut changer de garde-robe, parce que les souliers sont trop petits, ses pantoufles sont usées et il faut en changer, comme ce vieux manteau, n’a-t-il pas fait son temps ? Les bras lui dépassent, absurdement. On veut un beau chapeau contre la pluie, protégeant bien des vents. Sur la route de l’introverti, cela souffle, et les tempêtes et hivers sont longs. Il lui faut de nouveaux habits tout neufs, très à sa taille pour bien le préserver. Le discret sait que son costume de l’an dernier est bien trop étriqué, et que ce nouvel habit n’est indubitablement pas une variante définitive.

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Une journée d’affection : j’en suis digne.

Cette homéostasie maintenue par l’introverti délibérément, cet équilibrisme intérieur, cette belle autonomie solide et fidèle, que l’on porte en soi, comme un bouclier d’affection que l’on se rend à chaque beauté ou tension. L’introverti recueille une étreinte à chaque vérité croisée, à toute révélation, parmi les éléments et l’univers, ses maîtres seuls reconnus, leur invoquant de découvrir une de ses abondantes clés, de toucher du bout du doigt la percée d’une énigme. Un introverti chemine, ses antennes percevant toute la sympathie de l’univers à chaque souffle oxygénant, conscient des acquittements de ses 9 vies. Un introverti vit une histoire avec de la vie, un amour profond. Pas avec ses péripéties ni ses comédiens, constamment médiocres.

Une journée de renouveau : je renais.

C’est l’heure, des milliards de cellules mutent en moi à chaque exaseconde, mes chromosomes raccourcissent, mes télomères rapetissent. Chaque jour je m’approche de ma fin, pourtant chaque année je renais. Une naissance dans les douleurs de la sagesse, des éloignements ouvrant à soi. Je me donne naissance, et personne d’autre ne m’a portée en son sein durant mes ans de gestation. Je m’accouche, je me suis conçue consciente de soi. Je suis introvertie, je me peins et repeins, à la manière de l’artiste n’exposant pas l’œuvre de ses pinceaux. À chaque cycle je me dessine et m’expose à soi, celle ou celui que j’étais. Je suis introvertie et sur ma toile en clair-obscur, on perçoit le spectre de ce que l’introverti va rendre à la fortune.

TheIntrovertSinger

Heslon, C. (2008). Anniversaires et psychologie des âges de la vie. Le Journal des psychologues, 261(8), 45-49. https://doi.org/10.3917/jdp.261.0045

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